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Juridique - GSE - home - Ressources humaines | publié par Loyco | 17.09.2024

Incapacité pour maladie: les obligations de l’employeur

L’incapacité de travail pour cause de maladie est une situation à laquelle tout employeur peut être confronté. Elle soulève des questions importantes quant aux obligations légales de l’employeur et aux droits des collaborateur·rice·s. Quels sont les régimes prévus par la loi et quelles alternatives peuvent être mises en place? Notre partenaire, CJE, Avocats, Conseillers d’Entreprises, explore ici les obligations de l’employeur en cas d’incapacité pour maladie, ainsi que les différents régimes permettant de répondre aux exigences légales.

L’art. 324 a CO détermine les droits pécuniaires du·de la collaborateur·rice lorsque celui·celle-ci est empêché·e sans faute de sa part de fournir la prestation de travail convenue, notamment pour cause de maladie. Est réputée maladie toute atteinte à la santé physique, mentale ou psychique qui n’est pas due à un accident et qui exige un examen ou un traitement médical ou provoque une incapacité de travail (art. 3 al. 1 LPGA).

La loi prévoit deux régimes: le régime de base légal et le régime conventionnel dérogatoire.

L’art. 324a CO répartit entre l’employeur et le·la collaborateur·ice le risque de perte financière consécutive à un empêchement de travailler pour cause de maladie. Cet article prévoit un régime de base (al. 1 à 3) et offre la possibilité aux parties de prévoir un autre régime, à condition d’accorder des prestations au moins équivalentes (al. 4).

À ces deux régimes, que nous reprenons ci-dessous, il convient d’ajouter un régime conventionnel plus favorable, que nous examinerons brièvement.

L’obligation de payer le salaire n’existe que dans la mesure où les rapports de travail ont duré plus de trois mois (contrats de durée indéterminée) ou ont été conclus pour plus de trois mois (contrats de durée déterminée). Le·la collaborateur·rice doit être placé·e dans la situation qui serait la sienne s’il·elle était en mesure d’exécuter le contrat. Le salaire dû en cas d’empêchement de travailler comprend donc, en plus du salaire «fixe»:

  • les indemnités de renchérissement;
  • les allocations familiales;
  • les augmentations de salaire;
  • la part mensuelle du 13e salaire;
  • les indemnités pour travail effectué de nuit, le week-end et les jours fériés quand elles sont habituellement versées;
  • les frais fixes (assurance, frais de garage, etc.).

En revanche, sont exclus du salaire les gratifications, les indemnités mensuelles de repas et de frais de représentation ainsi que les autres frais variables (essence, etc.).

Lorsque les conditions prévues par la loi sont remplies, l’employeur a l’obligation de payer le salaire pour un temps limité (art. 324a al. 2 CO). Il s’agit du régime de base légale auquel il n’est pas possible de déroger au détriment du·de la travailleur·se. La durée pendant laquelle l’employeur doit payer le salaire est de 3 semaines pendant la 1ère année de service; ensuite, le salaire est dû pour une période plus longue fixée équitablement, compte tenu de la durée des rapports de travail et des circonstances particulières. Les tribunaux de Prud’hommes ont fixé différents barèmes qui servent de référence pour déterminer les droits des travailleurs·ses. Dans les cantons romands, on utilise en règle générale l’échelle de Berne qui est la suivante:

  • 1 mois dès la deuxième année de service dans l’entreprise;
  • 2 mois pendant la 3ème et la 4ème année de service dans l’entreprise;
  • 3 mois de la 5ème jusqu’à la fin de la 9ème année de service dans l’entreprise;
  • 4 mois de la 10ème jusqu’à la fin de la 14ème année de service dans l’entreprise;
  • 1 mois supplémentaire par cinq années de service en sus.

Fin du contrat de travail
Les obligations de l’employeur s’éteignent avec le contrat de travail. Le collaborateur ou la collaboratrice, même empêché de travailler, perd donc son droit au salaire lorsque le contrat de travail prend fin.

L’art. 324a al. 1 et 3 CO étant relativement impératif, des prestations plus favorables en faveur du·de la collaborateur·rice peuvent être convenues sans qu’aucune forme particulière ne soit exigée. On peut citer, à titre d’exemple, assurer la couverture des empêchements de travailler durant les trois premiers mois de travail, offrir le versement du salaire pour une durée plus longue que l’échelle bernoise, etc.

L’art 324a al. 4 CO stipule qu’un accord écrit, un contrat type de travail ou une convention collective de travail peut fonder une dérogation au régime de base, à condition d’accorder au·à la travailleur·se des prestations au moins équivalentes. Pour que le régime conventionnel s’applique, le législateur a fixé deux exigences: la forme spéciale et l’équivalence des prestations.

Si ces deux conditions sont remplies, l’employeur est libéré de l’obligation de payer le salaire selon le régime de base. En revanche, lorsqu’elles ne sont pas satisfaites, l’employeur reste tenu de verser les prestations prévues par l’art. 324a al. 1 et 2 CO mentionnés ci-dessus.

Forme spéciale

L’accord doit être écrit et revêtir la signature de l’employeur et du collaborateur ou de la collaboratrice. Le·la travailleur·se doit avoir connaissance de toutes les conditions d’assurance et l’employeur doit lui indiquer les points essentiels du régime conventionnel dérogatoire qui sont les suivants:

  • pourcentage du salaire versé
  • durée des prestations
  • risques couverts
  • restriction de couverture (p. ex : réserve)
  • modalités de financement
  • durée du délai de carence
  • droits au-delà de la fin du contrat de travail

Selon l’art. 3 al. 3 LCA, l’employeur est tenu de renseigner ses collaborateurs·rices par écrit ou par tout autre moyen permettant d’en établir la preuve par un texte, sur les principaux éléments du contrat d’assurance, ses modifications et sa dissolution.

Ces exigences de forme représentent une condition de validité de l’accord. Le droit du travail étant très formaliste, il est vivement conseillé à l’employeur de respecter ces exigences de forme, car, lorsqu’elles ne sont pas satisfaites, l’employeur reste tenu de verser les prestations prévues selon le régime légal de base, soit le salaire à 100 % pendant une durée qui dépend de la durée des rapports de travail.

Équivalence des prestations

Le régime dérogatoire n’est valable que s’il accorde au travailleur ou à la travailleuse des prestations au moins équivalentes à celles du régime légal de base. Il y a équivalence lorsque, de manière cumulative:

  • les indemnités journalières sont versées au moins pendant 720 jours, plus souvent 730 jours (365 jours x 2), au cours d’une période de 900 jours;
  • les indemnités journalières couvrent au moins 80 % du salaire;
  • l’employeur prend à sa charge au moins la moitié des primes;
  • un délai maximal de carence de 2 à 3 jours, sans droit au salaire; durant ce délai de carence, l’employeur est entièrement libéré de l’obligation de verser le salaire.

Si l’employeur choisit un délai d’attente plus long (p. ex : 30, 60 ou 90 jours), il doit payer le salaire complet durant le «temps limité» selon l’art. 324a al. 1 et 2 CO; les parties peuvent toutefois prévoir que l’employeur ne doit verser que l’équivalent des prestations d’assurance que le·la collaborateur·rice aurait reçues.

L’employeur qui opte pour le régime conventionnel dérogatoire et conclut une assurance maladie perte de gain veillera tout particulièrement à ce qui suit:

  • indiquer à ses collaborateurs ou collaboratrices les points essentiels du régime conventionnel dérogatoire, y compris, cas échéant: ses modifications et sa dissolution;
  • s’assurer de l’équivalence des prestations;
  • définir avec précision les prestations versées par l’employeur pendant le délai d’attente (salaire à 100% ou équivalent des prestations d’assurance).

 

Cet article a été rédigé par notre partenaire CJE, Avocats, Conseillers d’Entreprises.