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Juridique - Loyco | publié par Loyco | 23.11.2021

Abandon d’emploi et non entrée en fonction

L’abandon d’emploi est soumis à des conditions strictes. Notre partenaire CJE, Avocats Conseillers d’Entreprises, passe en revue les conditions et procédures relatives aux différents types d’abandons d’emploi.

Il est fréquent que l’employeur invoque un abandon d’emploi alors que, juridiquement, ce n’est pas le cas. Par exemple, si la collaboratrice ou le collaborateur ne se présente pas à son poste de travail au retour des vacances, l’employeur ne peut pas immédiatement conclure à un abandon d’emploi.

 

Disposition légale

«Lorsque le·la travailleur·euse n’entre pas en service ou abandonne son emploi abruptement sans justes motifs, l’employeur a droit à une indemnité égale au quart du salaire mensuel; il a en outre droit à la réparation du dommage supplémentaire» (art. 337d CO).

 

Quels sont les éléments constitutifs ?

L’application de l’art. 337d CO implique que le·la travailleur·euse refuse consciemment et de manière intentionnelle et définitive de poursuivre l’exécution des prestations de travail telles que prévues par son contrat. L’art. 337d CO présuppose un refus conscient, intentionnel (réfléchi), et définitif de poursuivre l’exécution du travail confié. Les trois conditions sont cumulatives.

Dès lors, pour qu’il y ait abandon d’emploi par le·la travailleur·euse au sens de la disposition précitée, il faut que la décision du·de la salarié·e d’abandonner son poste soit claire, définitive et sans aucune ambiguïté. Tel est le cas lorsque le refus résulte d’une déclaration expresse et sans équivoque du·de la travailleur·euse.

 

Deux types d’abandons d’emploi

La décision de la travailleuse ou du travailleur d’abandonner son emploi doit apparaître clairement et sans ambiguïté. Il y a deux types d’abandons d’emploi:

1.Abandon d’emploi clair et sans ambiguïté
L’abandon d’emploi est clair et sans ambiguïté lorsque le·la collaborateur·rice indique à son employeur qu’il·elle ne veut pas réintégrer son poste de travail et qu’il·elle restitue les différents effets en sa possession pour exercer son activité.

2.Abandon d’emploi résultant d’actes concluants
Lorsque l’abandon ne résulte pas d’une telle déclaration, il faut analyser si la renonciation découle du comportement adopté par l’intéressé·e, c’est-à-dire d’actes concluants. Il s’agit alors d’examiner si, compte tenu de toutes les circonstances, l’employeur pouvait objectivement et de bonne foi comprendre que son·sa collaborateur·rice entendait quitter son emploi.

Lorsque l’absence injustifiée est de courte durée, quelques jours, on ne peut en général pas déduire que le·la travailleur·euse a décidé d’abandonner son emploi, tandis que si elle est de plusieurs mois, on peut en général considérer qu’il y a abandon d’emploi. Dans les situations intermédiaires, il faut examiner au regard de l’ensemble des éléments de fait et des informations dont l’employeur dispose.

Le Tribunal fédéral a estimé qu’il n’y avait pas rupture des rapports de travail, mais un manquement qui peut, au besoin après avertissement, justifier une résiliation immédiate lorsque l’absence est de courte durée. À l’inverse, une absence de plusieurs mois doit être considérée comme un refus intentionnel et définitif de poursuivre les rapports de travail, même si, après coup, la travailleuse ou le travailleur offre inopinément de reprendre son poste. Dans ce cas, la durée de l’absence suffit en soi pour admettre que le·la travailleur·euse a démontré sa volonté d’abandonner son emploi.

Cependant, l’employeur ne peut se prévaloir d’un abandon de poste lorsqu’il·elle sait ou qu’il·elle soupçonne que le·la travailleur·euse a un problème de santé, quand bien même il·elle reste sans nouvelles de l’intéressé·e depuis quelque temps. L’employeur doit s’assurer que le·la travailleur·euse qui quitte abruptement son poste de travail exprime la volonté consciente, réfléchie et définitive de mettre un terme à son contrat. Lorsqu’un·e travailleur·euse quitte l’entreprise précipitamment en proie à une forte émotion à la suite d’un incident, tel qu’une altercation avec son·sa supérieur·e, sa volonté de mettre fin immédiatement à son contrat ne doit pas être tenue pour définitive, même si ce qu’il·elle a dit ou fait peut être compris dans ce sens.

3. Certificat médical et non-reconnaissance de l’incapacité de travail par l’assurance maladie perte de gain: un abandon d’emploi?
Y a-t-il abandon d’emploi lorsque l’assureur de l’employeur estime que le·la collaborateur·rice peut reprendre le travail, mais qu’il·elle continue à produire des certificats médicaux?

Il appartient au collaborateur ou à la collaboratrice d’apporter la preuve de son incapacité de travail. Si le·la collaborateur·rice conteste la position de l’assureur, il·elle jouit d’un droit d’action directe contre l’assureur perte de gain qu’il·elle doit donc exercer pour faire valoir ses droits. L’employeur ne pourra conclure à un abandon d’emploi. Le·la travailleur·euse dans ce cas n’émet pas la volonté de ne pas reprendre son activité, mais estime ne pas en être capable. En revanche, l’employeur pourrait, en se ralliant à la position de l’assureur, refuser de verser le salaire. Il ne nous paraît donc pas possible dans cette situation de dire qu’il y a abandon d’emploi tant qu’une décision définitive n’a pas été rendue.

 

Faut-il résilier le contrat de travail?

L’abandon d’emploi implique une rupture avec effet immédiat par le·la collaborateur·rice. L’employeur n’a donc pas à résilier le contrat et un licenciement ordinaire ou immédiat est donc inutile.

 

Comment procéder? 

Il appartient à l’employeur de prouver qu’il y a abandon d’emploi. En cas de doute, l’employeur mettra le·la collaborateur·rice en demeure de reprendre le travail à une date précise ou de lui justifier son absence en attestant par exemple de son incapacité de travail.

 

Quel préjudice, quelle réparation?

La loi prévoit que lorsque la travailleuse ou le travailleur n’entre pas en service ou abandonne son emploi abruptement sans justes motifs, l’employeur a droit à:

  • une indemnité forfaitaire maximale égale au quart du salaire mensuel:
    le·la travailleur·euses peut contester le bien-fondé de l’indemnité réclamée en prouvant que l’employeur a subi un dommage inférieur ou n’a subi aucun dommage.
  • la réparation du dommage supplémentaire (art. 337d CO).

Il appartient à l’employeur de prouver le dommage supplémentaire réclamé.

 

Comment déterminer le montant de l’indemnité forfaitaire?

Le salaire déterminant pour calculer l’indemnité forfaitaire égale au quart du salaire mensuel comprend le salaire de base, le 13e salaire ainsi que les autres avantages résultant du contrat de travail (participation aux résultats, gratification, compensation du salaire en nature perdu, etc.).

 

Comment obtenir la réparation du préjudice?

Il y a deux possibilités d’obtenir la réparation du préjudice:

  1.  Par compensation sur les montants encore dus à la travailleuse ou au travailleur;
  2.  Par des poursuites ou par une action judiciaire si les montants encore dus au·à la travailleur·euse ne sont pas suffisants.

Dans quel délai la réparation du préjudice peut-elle être demandée?
Si l’employeur ne peut compenser le montant de l’indemnité, il doit agir par voie de poursuites ou par une action justice à un délai de 30 jours à compter de la non-entrée en service ou de l’abandon d’emploi sous peine de péremption.

 

En conclusion

La non-entrée en service ou l’abandon d’emploi est soumis à des conditions et des règles précises qu’il convient de respecter.

 

Ce contenu a été rédigé par le cabinet CJE Avocats Conseillers d’Entreprises.