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Marchés publics | publié par Loyco | 18.08.2023

Marché public: la liberté de contracter de l’adjudicateur

Un adjudicateur peut-il renoncer à passer un contrat avec le vainqueur d’un marché public une fois la décision d’adjudication rendue? Un arrêt récent de la chambre administrative de la Cour de justice genevoise (arrêt du 13 juin 2023 (ATA/623/2023)) permet d’y répondre. Retrouvez ici une synthèse de cet arrêt par nos spécialistes en marchés publics Christel Biderbost et Loris Valldeperez.

 

Bref résumé de l’état de fait

Le 29 septembre 2021, B a publié un appel d’offres en procédure sélective, portant sur un marché public de services. Par décision du 17 juin 2022, A s’est vu adjuger ce marché. Cependant, en février 2023, B a pris la décision de ne pas conclure ce contrat avec A, invoquant notamment l’incapacité de A à mettre en œuvre son offre conformément aux conditions de l’appel d’offres. B avait déjà émis des doutes quant à la capacité de A à respecter les délais de réalisation du projet, compte tenu de son faible effectif, suite au départ de collaborateur·rice·s clé·e·s de A.

Le 10 mars 2023, A a formé recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice pour faire constater la nullité de la décision de B de ne pas conclure le contrat avec A, subsidiairement à son annulation et qu’il soit ordonné à B de «négocier de bonne foi avec A».

Retrouvez ici le texte complet de l’arrêt du 13 juin 2023 (ATA/623/2023).

 

Les éléments pertinents de l’arrêt

A. Deux phases distinctes, respectivement soumises au droit public et au droit privé

La première phase est celle de l’adjudication du marché à l’issue d’un processus d’appel d’offres, elle relève du droit public. L’adjudication ne vaut pas conclusion du contrat. Tous les éléments essentiels du futur contrat doivent déjà être fixés au moment de l’adjudication. Les négociations contractuelles entre l’autorité adjudicatrice et l’adjudicataire à propos des points secondaires, ne constituant pas des éléments essentiels du contrat, ne commencent qu’après la clôture de la procédure d’adjudication.

La deuxième phase, successive à la première et conduisant à la conclusion du contrat entre l’adjudicateur et l’adjudicataire, appartient en principe au domaine du droit privé.

 

B. La faculté de l’adjudicateur à conclure le contrat ou de renoncer 

Tant la jurisprudence que la doctrine reconnaissaient que la décision d’adjudication ne crée pas une obligation de contracter pour l’adjudicateur. Ce dernier peut donc conclure ou renoncer à conclure le contrat. Nul ne peut contraindre une autorité adjudicatrice à conclure un contrat.

Le Tribunal fédéral a d’ailleurs confirmé dans un arrêt que la décision à laquelle aboutit la procédure d’appel d’offres détermine de manière contraignante le·la candidat·e avec le ou laquelle l’adjudicateur doit conclure un contrat, mais elle n’attribue pas directement l’objet de la procédure d’adjudication au soumissionnaire ayant remporté le marché.

 

Implication pour les marchés publics

En somme, cet arrêt met en exergue l’importance de distinguer le processus d’adjudication et la finalisation du contrat. Si l’adjudication ouvre la voie à une potentielle contractualisation, elle ne garantit pas la concrétisation de celle-ci.

Si vous avez des questions sur le sujet, n’hésitez pas à prendre contact avec notre équipe de spécialistes en marchés publics.