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Juridique - Loyco | publié par Loyco | 25.10.2023

Incapacité de travail: la situation délicate du doute

Dans de rares situations, il peut arriver que l’employeur puisse avoir des doutes raisonnables sur l’incapacité de travail d’un·e collaborateur·rice. Cette situation délicate doit être gérée avec humanité et tout en respectant le cadre légal donné par le droit du travail. Notre partenaire CJE Avocats Conseillers d’Entreprises fait le point sur la question et propose des pistes pour anticiper et diminuer les risques de conflits liés à ce cas de figure.

Dans la règle, les certificats médicaux sont admis et ne posent guère de problème. Cependant, il peut y avoir des circonstances dans lesquelles l’employeur dispose d’éléments objectifs qui le font douter de la réalité de l’incapacité. Le dossier devient alors en général délicat et sensible.

C’est la raison pour laquelle l’employeur prévoyant anticipera le règlement de ces situations dans le contrat de travail. Cela réduit le risque de conflit et, s’il survient tout de même, permet de s’appuyer sur les règles du contrat de travail dont le contenu a été validé par le/la collaborateur·rice. Il convient en outre de ne pas négliger la possibilité de demander un certificat médical détaillé qui permet au médecin de l’établir en toute connaissance de cause. Nous reviendrons en détails sur ces questions dans les lignes qui suivent. Mais tout d’abord, commençons par les éléments de base.

Qu’est-ce qu’un certificat médical?

Le Tribunal fédéral définit le certificat médical comme une constatation écrite relevant de la science médicale et qui se rapporte à l’état de santé d’une personne, en particulier à sa capacité de travail (Arrêt du Tribunal fédéral 4C.156/2005).

Le certificat médical: une preuve absolue de l’incapacité?

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, le certificat médical est un moyen de preuve comme un autre et n’est donc pas absolu.

Sa remise en cause par l’employeur suppose toutefois de sérieuses raisons qui peuvent provenir du comportement du collaborateur, de circonstances particulières, notamment le moment où il est demandé, ou de tout autre fait qui permet à l’employeur de douter de la réalité de l’incapacité de travail.

Qu’est-ce qu’un médecin-conseil d’entreprise?

L’employeur est autorisé à faire appel à un médecin-conseil d’entreprise afin d’avoir un deuxième avis sur l’état de santé du collaborateur et de lever tout doute quant à la réalité et au taux d’incapacité de travailler.

Quelles conséquences si le collaborateur refuse d’être ausculté par le médecin-conseil d’entreprise?

Si le collaborateur refuse d’être examiné par le médecin-conseil d’entreprise, il contrevient à son devoir de diligence et de fidélité (art. 321a CO); l’employeur peut alors légitimement en déduire un aveu du caractère non fondé du certificat médical produit et refuser ou suspendre le versement du salaire jusqu’à ce que le collaborateur accepte de se faire examiner par le médecin-conseil, voire le licencier.

Un certificat médical simple ou détaillé?

  • Le certificat médical simple: L’employeur demande en général à son médecin-conseil d’établir un certificat simple, c’est-à-dire qui porte exclusivement sur l’aptitude, respectivement l’inaptitude totale ou partielle, passagère ou durable du collaborateur à travailler.
  • Le certificat médical détaillé: L’employeur a la possibilité d’adresser au médecin-conseil une description détaillée des tâches et activités confiées au collaborateur, ainsi que de son horaire, afin d’obtenir un certificat médical détaillé qui indique les activités que le collaborateur ne peut pas ou plus effectuer et celles qu’il peut encore accomplir. Une même cause n’a pas les mêmes effets selon l’activité du collaborateur. Par exemple, un maçon qui a un pied dans le plâtre ne peut pas travailler, tandis que cela est possible, à tout le moins partiellement, pour un collaborateur d’administration. L’employeur ne doit pas négliger la possibilité de demander un certificat médical détaillé qui peut permettre une reprise d’activité plus rapide.

 

Quels types de clauses prévoir dans le contrat de travail?

Par souci de transparence et de clarté, l’employeur réglera notamment les questions ci-dessous dans le contrat de travail:

  • Les circonstances dans lesquelles il peut demander au collaborateur de se soumettre à un examen par le médecin-conseil, p. ex: les circonstances et le moment auxquelles l’incapacité est alléguée.
  • Le but de la consultation, soit confirmer ou infirmer la réalité de l’incapacité.
  • Qui prend en charge les frais de consultation; les frais sont à charge de l’employeur, à moins d’un abus du collaborateur.
  • L’obligation du médecin-conseil de respecter le secret médical à l’égard de l’employeur
  • Les conséquences pour le collaborateur s’il ne se présente pas à la consultation chez le médecin-conseil: par exemple, la possibilité pour l’employeur de contester la réalité de l’incapacité et de suspendre le paiement du salaire jusqu’à ce que le collaborateur se présente à la consultation chez le médecin-conseil.
  • Les conséquences pour le collaborateur si l’incapacité de travail n’existe pas ou seulement partiellement; par exemple, le droit pour l’employeur, respectivement l’assurance, de réclamer le remboursement des montants indûment payés.

 

Que peut contenir la convention médecin-conseil – employeur?

  • Les tâches confiées au médecin-conseil.
  • Confirmer l’obligation du secret médical du médecin-conseil à l’égard de l’employeur, respectivement du collaborateur.
  • Régler les modalités et l’organisation des rendez-vous médicaux.
  • La responsabilité du médecin-conseil.
  • La durée, la modification, respectivement la résiliation de la convention médecin-conseil – employeur.